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«L’Etat doit enquêter sur les disparus en mer» : Le Porte-parole des familles de harraga de Annaba

15 Août 2009 , Rédigé par Samir Ould Ali Publié dans #Emigration clandestine

Le drame, qui eut lieu le 7 août dernier au large des côtes bônoises quand un harrag, en l’occurrence le jeune Ikram Hamza, a trouvé la mort dans des conditions tragiques, continue de susciter de vives indignations.

Contacté par nos soins, Kamel Belabed, porte-parole des familles de disparus en mer de la wilaya de Annaba, a tenu d’abord à souligner que «ce n’est pas la première fois que des harraga se voient percutés par les gardes-côtes : cela s’est déjà passé en 2007, trois jours après que Gaïd Salah (chef d’état-major de l’ANP, ndlr) eut déclaré la guerre aux harraga. Les gardes-côtes avaient alors coulé une embarcation. C’était un sardinier qui transportait un jeune harrag algérois. Son corps n’a jamais été repêché. Sa sœur a passé trois mois avec nous à courir pour récupérer la dépouille de son frère, en vain. Ensuite, il y eut une autre affaire de même nature, et puis il y a celle-là.» Pour lui, ce qui vient de se passer au large de Annaba est le résultat d’une manœuvre malheureuse de la part des forces du groupement territorial des garde-côtes. «J’ai rencontré les familles pour leur présenter mes condoléances et elles soutiennent que c’est un meurtre avec préméditation. Tout le monde est unanime là-dessus : on imagine mal un rafiot se mesurer à un bateau de guerre», appuie-t-il, en précisant que le frère du jeune Ikram Hamza qui a trouvé la mort observe une grève de la faim pour exiger une nouvelle autopsie.
Les témoignages des rescapés abondent dans le même sens, précise notre interlocuteur. «Je suis en train justement de recueillir ces témoignages et de les enregistrer», indique K. Belabed, avant d’ajouter : «J’ai vu l’un de ces jeunes : il s’est sauvé de l’hôpital de peur d’être inculpé après son hospitalisation. Deux ou trois autres rescapés ont fui l’hôpital, également pour les mêmes raisons.» En effet, la criminalisation de la harga est venue compliquer les choses, estiment les spécialistes. Pour Kamel Belabed, la société civile doit s’impliquer davantage pour soutenir les jeunes harraga comparaissant devant la justice. «Il faut que les ligues des droits de l’homme accompagnent les harraga lors de leur inculpation. Il faut leur porter une assistance juridique dès leur comparution devant le procureur.» Le porte-parole des familles de harraga disparus en mer déplore à ce propos le manque de solidarité exprimée par la société vis-à-vis des harraga : «Au moment où le drame prend des proportions tragiques, il faut manifester un peu plus de solidarité citoyenne.» Et d’accabler à nouveau l’Etat dans sa gestion «catastrophique» du dossier des harraga disparus en mer. «On veut systématiser les enquêtes quand il y a doute. Il est du devoir de l’Etat d’ouvrir des enquêtes systématiquement dès qu’un disparu en mer est signalé. On souffre du mépris de l’Etat», insiste-t-il. «Il est anormal que nous alertions les gardes-côtes sur nos enfants disparus en mer et qu’ils ne réagissent pas», dénonce M. Belabed. L’homme demeure convaincu que nombre de harraga dont aucune trace n’a été retrouvée «sont détenus quelque part». «Nous avons suivi tous les naufrages, fait toutes les morgues, il n’y a aucune trace d’eux. Ce n’est pas normal.»
Kamel Belabed n’a plus de nouvelles de son fils Marwan depuis le 17 avril 2007 ; il avait pris le large à destination de l’Italie, en compagnie d’une dizaine de personnes.

(El Watan - 15 août 2009)

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