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Fin du crédit à la consommation : Les banques étrangères dans la tourmente

9 Août 2009 , Rédigé par Samir Ould Ali Publié dans #Revue de Presse

Certaines dispositions de la loi de finances complémentaire pour l’année 2009 ont jeté le trouble dans le milieu des banques et certains responsables évoquent, à juste titre, une baisse vertigineuse de leurs activités pouvant les conduire tout droit à la faillite. Ces nouvelles mesures sont, par ailleurs, venues compliquer les problèmes déjà très graves auxquels doivent faire face de nombreuses banques étrangères tenues de payer - pour diverses raisons, parmi lesquelles l’entorse à la législation des changes et le transfert illégal de dividendes - de très lourdes pénalités à la Banque d’Algérie. On se souvient qu’elles étaient également pénalisées par l’interdiction faite aux entreprises et institutions publiques algériennes de déposer des capitaux dans les banques privées.

Bien qu’officiellement levée depuis un peu plus d’une année, cette restriction continue aujourd’hui encore à sévir dans les faits, les dépôts des institutions étatiques dans les banques privées étant pratiquement nuls. Les banques étrangères se sont de ce fait rabattues sur le crédit à la consommation, qui dispose d’un vaste marché dans notre pays eu égard aux besoins des classes moyennes en automobiles, produits électroménagers et autres. Ce créneau leur permettait de réaliser des chiffres d’affaires appréciables à même de justifier leur présence en Algérie.


Le crédit immobilier

De ce fait, l’interdiction (sans discernement de statuts) désormais faite à toutes les banques d’octroyer des crédits à la consommation risque d’emporter d’abord et avant tout les banques privées étrangères qui, à l’exemple de Cetelem et City Bank, ont centré le gros de leurs activités sur ce créneau du crédit à la consommation. Bien qu’à moindre échelle, les banques publiques algériennes y laisseront également des plumes car elles s’étaient pratiquement toutes mises à ce type de crédit qui leur procurait d’importants gains. Il est illusoire de croire qu’elles pourront rapidement compenser ce service, comme le souhaiteraient les rédacteurs de la loi de finances complémentaire, par celui du crédit immobilier sur lequel elles devront désormais se concentrer. Pour promouvoir le crédit immobilier, il aurait, en effet, fallu que les pouvoirs publics algériens règlent au préalable la question de la disponibilité des terrains à bâtir qui bloque, depuis bien des années, l’essor de la promotion immobilière. Certains que ces problèmes ne seront pas réglés de sitôt, les promoteurs immobiliers ne seront, à l’évidence, pas nombreux à investir ce créneau. Les demandes de crédits immobiliers ont, par conséquent, très peu de chances de connaître un essor tel qu’ils pourraient compenser les manques à gagner dus à l’abandon forcé du créneau très lucratif du crédit à la consommation. L’autre difficulté, et non des moindres, à laquelle devront faire face les banques, notamment les institutions financières étrangères qui accompagnent les sociétés qui font commerce avec l’Algérie, est sans conteste la baisse drastique de l’activité des entreprises d’import-export, auxquelles la loi de finances complémentaire fait désormais obligation d’ouvrir au minimum 30% de leur capital à des opérateurs locaux. Outre l’hostilité clairement affichée par les sociétés étrangères à ce type d’obligation, il ne sera pas facile de trouver, à brève échéance, des partenaires aux 16 000 sociétés d’importation concernées par cette disposition. Il faudrait certainement ajouter à ces difficultés majeures celle ayant trait aux crédits d’investissement que les banques étrangères ne pourront pas développer de façon significative, les promoteurs étrangers susceptibles d’être leurs clients étant désormais obligés d’intégrer à leurs projets des partenaires locaux à hauteur de 51%. Une exigence qu’à l’évidence peu de promoteurs étrangers accepteront.


Dommages collatéraux

Les banques étrangères seront évidemment les grandes perdantes des baisses d’activité conséquentes à toutes ces décisions qui sonnent comme une volonté de les reprendre en main car elles commençaient à prendre un peu trop d’ampleur aux yeux de ceux que cela dérangeait. C’est dire l’importance des dommages collatéraux de cette loi de finances complémentaire qui risque de porter un coup fatal à de nombreuses banques étrangères activant dans notre pays, comme l’avaient fait auparavant certaines dispositions restrictives édictées à la suite de l’affaire Khalifa, qui avaient, on s’en souvient, fait disparaître du secteur bancaire pratiquement toutes les banques privées détenues par des Algériens.

Beaucoup de questions viennent alors à l’esprit et la plus importante d’entre elles consiste à savoir si c’est bien la disparition des banques étrangères que visait expressément le gouvernement à travers la promulgation de cette loi de finances complémentaire. Si ce n’est pas le cas, quelles garanties pourrait-il leur offrir pour compenser les pertes qu’elles sont appelées à subir du fait des dispositions de la loi de finances complémentaire ? On se pose par ailleurs la question de savoir si c’est là le bon moyen de réduire les importations qui ont, il est vrai, atteint un niveau alarmant, sachant qu’avec des programmes de développement aussi ambitieux (plus de 150 milliards de dollars) requérant de gros volumes d’importation pour leur réalisation, on ne peut pas mettre un frein aux importations sans prendre le risque de créer des pénuries et de compromettre la réalisation des plans de développement. La solution ne résiderait-elle pas plutôt dans l’aide que devrait apporter l’Etat algérien aux entreprises locales, empêtrées depuis bien des années dans d’inextricables problèmes de bureaucratie, de mise à niveau, d’accès au crédit, au foncier et autres obstacles qui les empêchent de progresser ?

(El Watan - 09 août 2009)

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