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Benjamin Stora à Oran

1 Mai 2009 , Rédigé par Samir Ould Ali Publié dans #Oran

Les influences de Mohamed Harbi
(In La Tribune - Février 2008)

Avant d’entamer sa communication, jeudi au deuxième jour du colloque sur Mohamed Harbi, Benjamin Stora a tenu à préciser que «le refus, en France, d’analyser l’histoire algérienne est justifié par le refus des Algériens de le faire. Avec cette rencontre, il apparaît qu’il y a des Algériens qui avancent, l’argument français est donc irrecevable.»
Dans sa longue intervention, Un historien algérien en exil, Benjamin Stora a dit dire toute l’influence bénéfique que l’œuvre de l’auteur du Aux origines du FLN a eue pour la compréhension du mouvement nationaliste algérien, et pour évoquer sa rencontre avec Harbi dans les années 70’ alors que lui-même n’était encore que jeune étudiant: «Mohamed Harbi m’est apparu libre de toute attache, de toute idéologie (…) Un historien qui n’a que faire des étiquettes, plus attaché à l’intelligence, aux idées qu’à la nationalité et libre d’aller où bon lui semble sans devoir rendre des comptes aux Etats», a-t-il apprécié en soulignant le choc que la lecture Aux origine du FLN a provoqué en lui : «Aux origines du FLN, livre fondateur, a été un choc pour l’étudiant que j’étais parce l’histoire critique du FLN venait d’un militant du parti (…) et la critique féroce de la bureaucratisation du PPA / MTLD, annonciatrice de la crise dans les années 50’, a trouvé une grande résonance en moi.» D’ailleurs, avoue Benjamin Stora, c’est en partie grâce «à la biographie sur Messali El Hadj, contenue dans le livre de Harbi, que j’ai eu l’idée de consacrer ma thèse au fondateur du mouvement nationaliste algérien.»
Malgré la différence d’âge et de parcours qui les séparent (Mohamed, largement quadragénaire, venait de faire la Révolution alors que Benjamin, bien que proche du courant trotskiste qui avait soutenu le MNA de Messali El Hadj, est toujours un jeune étudiant), les deux hommes se retrouvent dans leur formation idéologique et politique mais aussi dans leur passion de la vérité historique : «Faire l’histoire de l’Algérie est périlleux, le mouvement nationaliste étant un territoire, un facteur de légitimation historique, enjeu et objet de combat. Etre historien, c’est mener un combat. Séparer l’histoire de l’idéologie de celle du mythe.» Et dans son œuvre de dissection de l’histoire du mouvement nationaliste algérien Mohamed Harbi, libre de toute attache idéologique, réussit parfaitement à séparer l’idéologie de du mythe.
Egalement captivé par l’histoire à hauteur d’homme, Benjamin Stora décide d’élaborer un ouvrage biographique sur les militants du mouvement nationaliste algériens et, avec l’aide notamment de Mohamed Harbi, il réalise en 1985 un dictionnaire de 600 biographies de militants algériens : «Ce qui m’a intéressé, c’est l’écriture à hauteur d’homme, les parcours individuels, les regroupements familiaux, les ancrages régionaux, les territoires d’appartenance, soit l’Algérie en mouvement.», a-t-il encore expliqué pour soulignant l’importance de cet aspect dans toute étude historique.
Tout au long d’une communication très bien accueillie par la très nombreuse assistance (encore une fois, la salle de conférence n’a pas réussi à contenir tous les présents), Benjamin Stora a évoqué tous les aspects qui l’ont interpellé ou influé son propre itinéraire d’historien, au moment (années 70’) où la majorité des nouveaux historiens et chercheurs français «oubliaient l’Algérie pour ne se préoccuper que de la période de la seconde mondiale, la critique de Vichy…Le livre de Mohamed Harbi est venu immédiatement remplir ce vide de la scène politique et médiatique. Dès lors, on recommençait à réfléchir sur la guerre d’Algérie et sur ce qui s’y était passé.»
Après Stora, d’autres chercheurs et universitaires nationaux et étrangers ont intervenu pour parler du rôle majeur de Mohamed Harbi dans l’analyse scientifique, froide, de l’histoire algérienne, et de son importance pour la compréhension du mouvement nationaliste loin de tout subjectivisme. Un rôle si considérable qu’il demeure incompréhensible que, dans l’Algérie des années 2.000, l’on se refuse toujours, académiquement parlant, à s’emparer de l’œuvre de Harbi pour la disséquer et en faire profiter les jeunes générations. A l’évidence, un demi-siècle plus tard, le mouvement nationaliste demeure toujours un facteur de légitimation historique et objet de combat. Et le mythe est toujours là.
 
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